La fonction associant à chaque nombre réel sa partie entière est
traitée à l'article Partie entière. Voir
aussi la page Entier (homonymie).
En analyse complexe, une
fonction entière est une fonction holomorphe définie sur tout le plan complexe. C'est le
cas notamment de la fonction exponentielle complexe, des fonctions
polynômes et de leurs
combinaisons par composition, somme et produit, telles que
sinus,
cosinus et les
fonctions hyperboliques.
Le quotient de deux fonctions entières est une fonction méromorphe.
Considérée comme un cas particulier de la théorie des fonctions
analytiques, la théorie élémentaire des fonctions entières ne fait que
tirer les conséquences de la théorie générale. C'est celle que l'on voit
essentiellement dans un premier cours sur la théorie des fonctions
complexes (souvent enrichi du théorème de factorisation de Weierstrass).
Mais l'étude, commencée depuis le milieu du XIX
e siècle, par Cauchy, Laguerre, Weierstrass, ... s'est considérablement enrichie sous
l'impulsion de Borel, Hadamard, Montel,
Valiron, Blumenthal, ... (sans oublier Nevanlinna) et constitue maintenant une imposante
théorie.
La théorie des fonctions entières se fixe comme buts de classifier
les fonctions entières selon leurs croissances, de préciser le lien
entre les coefficients de Taylor de la fonction et la croissance, le
lien entre les zéros éventuels et le comportement de la fonction, et les
relations entre la fonction et ses dérivées sur ces questions.
Ces aspects de la théorie des fonctions entières ont été étendus aux
fonctions méromorphes.
- 1 Les fonctions entières
dans la théorie des fonctions analytiques
- 2 Théorie élémentaire
- 2.1 Les inégalités de
Cauchy
- 2.2 Le théorème de
Liouville
- 2.3 Propriétés
algébriques
- 2.4 Le point à l'infini
- 2.5 Le principe des
zéros isolés
- 2.6 Le théorème de
l'image ouverte
- 2.7 Le principe du
maximum
- 2.7.1 Les théorèmes de
Phragmén-Lindelöf
3 La croissance des fonctions entières 3.1 Le module maximum des fonctions entières 3.2 L'ordre des fonctions entières 3.3 Exemples 3.4 Relation entre les coefficients et la croissance 3.5 Le lemme de Borel-Carathéodory 3.6 L'ordre de la dérivée d'une fonction entière 3.7 Ordre inférieur et ordre précisé L 3.8 Les fonctions entières à croissance régulière
4 Factorisation des fonctions entières d'ordre fini 4.1 Le théorème de factorisation de Weierstrass 4.2 Estimations sur le produit canonique
5 Le terme maximum de la série de Taylor 6 La distribution des valeurs des fonctions entières 6.1 Les zéros des fonctions entières 6.2 La formule de Jensen et l'exposant de convergence des zéros 6.3 Le genre 6.4 Un théorème de Laguerre 6.5 Le lien entre la croissance et la distribution des zéros 6.6 Les fonctions entières d'ordre non-entier 6.7 Les fonctions entières d'ordre entier 6.8 Les fonctions entières et les angles 6.9 Les cercles de remplissage 6.10 Les valeurs asymptotiques 6.11 La conjecture de Denjoy 6.12 La fonction indicatrice de Phragmén-Lindelöf 6.13 Le théorème de Carlson 6.14 Le théorème de Pólya
7 La théorie des fonctions entières d'ordre infini de Kraft-Blumenthal 8 La théorie des fonctions entières d'ordre 0 9 Applications de la théorie des fonctions entières 10 Bibliographie 11 Notes et références
|
Les
fonctions entières dans la théorie des fonctions analytiques[modifier]On classe habituellement les fonctions analytiques complexes selon
leur complexité, et cette complexité est celle de leurs singularités.
Hormis les fonctions polynômes, apparaissent ainsi les fonctions
entières qui sont l'objet de cet article, les fonctions méromorphes qui
sont des quotients de fonctions entières et dont les seules singularités
sont polaires, les fonctions présentant des singularités essentielles
ou des points de branchement formant ainsi les fonctions les plus
compliquées parmi les fonctions analytiques d'une seule variable
complexe.
Les fonctions entières apparaissent comme des généralisations des
fonctions polynômes : elles se comportent comme des "polynômes de degré
infini". Ce sont ainsi les fonctions analytiques les plus simples en
dehors des polynômes, n'ayant aucune singularité à distance finie et une
seule singularité à l'infini, comme on le verra. Cependant l'étude de
ces fonctions est difficile et il reste encore de très nombreuses
questions ouvertes bien que cette étude soit commencée depuis près de
deux cents ans.
Théorie élémentaire[modifier]Soit
f une fonction analytique complexe holomorphe en
z.
Elle est développable en série entière autour du point
z selon
la formule de Taylor-MacLaurin
La théorie des séries entières montre que la série précédente
converge absolument et uniformément dans le disque ouvert de centre
z et de rayon
R donné par le théorème de Cauchy-Hadamard :
Le principal résultat de la théorie des fonctions analytiques
complexes est que le rayon de convergence est déterminé par la distance
entre le point
et la singularité la plus proche.
On dit d'une fonction analytique complexe qu'elle est entière
lorsqu'elle est holomorphe en tout point du plan complexe. Elle n'a donc
pas de singularité à distance finie.
Rappelons qu'une fonction holomorphe en un point y est indéfiniment
dérivable.
Soit
f une fonction entière. Comme toute fonction analytique
holomorphe en un point, elle est développable en série entière
convergente de la forme
et, comme elle n'a d'autre singularité que le point à l'infini, le
rayon de convergence est infini. Autrement dit, la série converge quelle
que soit la valeur de
z.
On a donc
Et il en est de même de chacune de ses dérivées qui sont entières
également.
La formule intégrale de Cauchy
permet, en développant la fraction 1/(
s-
z) en série
entière, d'identifier les coefficients de Taylor à des intégrales :
Dans les deux cas
est un chemin fermé (un lacet) sans boucle entourant
z.
Les inégalités de Cauchy[modifier]Article
détaillé : inégalité de Cauchy.
Dans la formule intégrale donnant les coefficients, en appelant
le maximum du module de la fonction sur le
disque de centre
z et de rayon
R, une majoration simple
donne les inestimables
inégalités de Cauchy
Le théorème de Liouville[modifier]Un résultat important sur les fonctions entières est le théorème de Liouville:
Théorème de Liouville — Si une fonction entière est bornée,
alors elle est constante.
Une démonstration possible est l'application des inégalités de Cauchy
en remarquant que
est alors borné quel que soit
.
Il suffit donc de faire tendre
vers l'infini pour avoir le résultat.
Cela peut être utilisé pour fournir une démonstration élégante, par
l'absurde, du théorème de d'Alembert-Gauss :
Théorème de d'Alembert-Gauss — Tout polynôme de degré
n admet
exactement
n racines complexes comptées avec leur multiplicité.
Le petit théorème de Picard renforce
considérablement le théorème de Liouville
Petit théorème de Picard — Toute fonction entière non constante
prend, sur le plan complexe, toutes les valeurs sauf une au plus.
Dans un certain sens, qui sera précisé plus tard, la théorie des
fonctions entières tourne entièrement autour du petit théorème de
Picard.
Propriétés algébriques[modifier]
- Une fonction holomorphe définie sur un domaine – c'est-à-dire
un ouvert connexe – s'étend en une fonction
entière si et seulement si le rayon de convergence de sa série de Taylor est infini en un point quelconque de son
domaine.
- L'ensemble des fonctions entières est stable par composition et forme une sous-algèbre complexe de l'espace des
fonctions continues du plan complexe dans lui-même.
Le point à l'infini[modifier]Comme une fonction entière est constante si elle bornée, et qu'elle
ne peut avoir aucun autre point singulier que l'infini, le point à
l'infini est un point singulier pour toute fonction entière non
constante. Il ne peut s'agir que d'un pôle ou d'une singularité
essentielle. Dans le premier cas (le pôle à l'infini), la fonction
entière est un polynôme. Dans le second cas (singularité essentielle en
l'infini), on dit que la fonction est
transcendante.
Le principe des zéros
isolés[modifier]Soit
f une fonction analytique dans un domaine
U,
s'annulant en
a. Alors, ou
f est identiquement nulle, ou
il existe un disque
D de centre
a, pour lequel
f(
s)
est non nul, quel que soit
s dans
D autre que
a.
Ceci se déduit du principe du prolongement analytique.
Le théorème de l'image ouverte[modifier]Si
f est une fonction analytique non constante sur un ouvert
U,
alors
f(
U) est un ouvert.
On peut le démontrer à partir du principe des zéros isolés.
Le principe du maximum[modifier]Soit
f une fonction analytique non constante sur un domaine
D.
Du théorème de l'image ouverte on déduit immédiatement :
- le module de f ne possède pas de maximum local dans D
(donc, si D est borné, le maximum de |f| se trouve sur la
frontière de D) ;
- si f ne s'annule pas sur D alors |f| ne possède pas
non plus de minimum local dans D ;
- la partie réelle de f ne possède dans D
ni maximum local, ni minimum local.
On en déduit notamment le lemme de Schwarz.
Plus généralement, toute fonction sous-harmonique (comme |
f|
et, si
f ne s'annule pas, 1/|
f|) vérifie le principe du
maximum, donc toute fonction harmonique (comme Re(
f)) vérifie le
principe du maximum et du minimum.
Les
théorèmes de Phragmén-Lindelöf[modifier]Le principe
de Phragmén-Lindelöf
(en) est une
généralisation du principe du module maximum à des domaines non bornés.
La croissance des
fonctions entières[modifier]
Le module maximum des
fonctions entières[modifier]On dit d'une fonction analytique complexe qu'elle est entière
lorsqu'elle est définie sur le plan complexe tout entier et holomorphe
en chaque point. Elle ne présente donc que le point à l'infini pour
seule singularité.
On pose
Cette fonction croît monotonement, par suite du principe du maximum.
Et, en corollaire du théorème de Liouville, elle n'est pas bornée pour
les fonctions entières non constantes.
Elle est appelée
module maximum de la fonction .
« La fonction ln
est une fonction convexe de ln r. (Hadamard)[1]
»
« La fonction ln
est continue et analytique par intervalles. (Blumenthal) »
En conséquence de la convexité, ln
admet une dérivée à droite et à gauche, et ces dérivées sont
croissantes. Il existe une fonction
croissante (mais pas nécessairement continue) telle que
L'ordre des fonctions
entières[modifier]Si pour une valeur quelconque
,
on a
la fonction
f est un polynôme de degré au plus égal à
.
Lorsque l'égalité précédente n'a lieu pour aucune valeur de
,
on compare la croissance de
à
.
Si l'on a, à partir d'une valeur
de
,
l'inégalité
on dit que la fonction est d'ordre fini. L'ordre (supérieur) de
croissance de
est donné par la formule
On distingue, parmi les fonctions entières de même ordre
,
les fonctions de type
défini par la formule
Selon la valeur de
,
on distingue le type minimal (
),
normal (
)
ou maximal (
).
On montre les résultats suivants :
Exemples[modifier]La fonction
est d'ordre 1 ainsi que les fonctions
et
.
La fonction de Mittag-Leffler
est d'ordre
.
Il en est de même de la fonction de Lindelöf définie par
Relation entre les
coefficients et la croissance[modifier]
- Si la fonction entière est telle que
et que
pour
suffisamment grand,
alors on a
pour
suffisamment grand.
- Réciproquement, si l'on a
pour
suffisamment grand, alors, pour tout
,
pour
suffisamment grand.
De ce résultat on déduit
« L'ordre de la fonction entière est déterminé par la formule
Le type de la fonction entière est déterminé par la formule
»
Le lemme de Borel-Carathéodory[modifier]On a vu que le maximum sur un cercle est en rapport avec les
coefficients de la fonction développée en série entière. On peut se
demander s'il en est de même, par exemple, avec seulement la partie
réelle de la fonction. Ce lien est fourni de manière générale par le lemme de Borel-Carathéodory, qui
donne de plus une estimation concernant les dérivées :
« Soit f(z) une fonction analytique dans la boule fermée B(0,R) de
centre 0 et de rayon R, et A(r) le maximum de sa partie réelle prise sur
le cercle de rayon r.
Alors on a l'inégalité suivante, pour tout r compris dans ]0,R[:
et, si
»
L'ordre
de la dérivée d'une fonction entière[modifier]La dérivée d'une fonction entière est obtenue par dérivation formelle
de sa série entière. En appliquant la formule de Cauchy-Hadamard, on
voit que la dérivée d'une fonction entière est elle-même entière. La
question de l'ordre de la dérivée se pose donc naturellement. Le calcul
de l'ordre par la formule précédemment donnée montre que
« L'ordre de la dérivée d'une fonction entière est égal à l'ordre
de cette fonction. »
Et, comme une fonction entière est indéfiniment dérivable, il en est
de même de toutes ses dérivées.
Ordre inférieur
et ordre précisé L[modifier]Pour comparer plus finement la croissance des fonctions entières, on
est amené à regarder l'ordre inférieur de croissance, défini par la
quantité
On montre que
« L'ordre inférieur de la dérivée d'une fonction entière est égal
à l'ordre inférieur de cette fonction. »
Mais cela ne suffit pas. On montre l'existence, pour une fonction
entière
d'ordre fini
,
d'une fonction
ayant les propriétés suivantes :
est définie et continue, dérivable à droite et à gauche en chaque
point.
On a ainsi défini
un ordre précisé L de
.
Les
fonctions entières à croissance régulière[modifier]Dans ses études sur les fonctions entières, Émile Borel a défini les
fonctions
entières à croissance régulière en supposant que l'ordre de la
fonction entière est
Il résulte de la définition que les ordres supérieur et inférieur
sont égaux. C'est en ce sens que la fonction est à croissance régulière.
« Une condition nécessaire et suffisante pour qu'une fonction
entière d'ordre
soit une fonction à croissance régulière est
pour tout entier
assez grand et tout
et qu'il existe une suite d'entiers
telle que
et pour laquelle on a
avec
»
Factorisation
des fonctions entières d'ordre fini[modifier]
Le théorème
de factorisation de Weierstrass[modifier]Article
détaillé : théorème de
factorisation de Weierstrass.
Cette importante propriété de factorisation (et sa généralisation par
Hadamard) : fait l'objet d'un article à part entière : théorème de
factorisation de Weierstrass.
Estimations sur le produit
canonique[modifier]Le théorème de Boutroux-Cartan énonce un résultat fréquemment utilisé
dans les recherches sur les fonctions entières. Le problème est
d'estimer le produit
en dehors du voisinage des zéros. On suppose que l'on connaît
.
Le théorème s'énonce ainsi
« Pour tout nombre ,
on a
en dehors d'au plus
cercles dont la somme des rayons est au plus . »
Le terme maximum de la
série de Taylor[modifier]Soit
une fonction entière. La série
est une série décroissante à partir d'un certain rang et tendant vers
0, quel que soit
.
Il y a donc, pour chaque
un terme supérieur ou égal à tous les autres. Soit
la valeur de ce terme et soit
le rang (le plus grand, s'ils sont plusieurs) de ce terme.
est une fonction croissante de
qui tend vers l'infini. D'après l'inégalité de Cauchy, on a
.
« Le rang
est une fonction non-décroissante de
qui tend vers l'infini avec .
»
Entre les fonctions
,
et
existe une double inégalité:
et de cette double inégalité on déduit
« Pour une fonction d'ordre fini, les fonctions
et
sont asymptotiquement égales. »
On en déduit ensuite une relation sur
:
« Pour une fonction entière parfaitement régulière d'ordre fini
et d'ordre précisé ,
on a »
De manière générale, on a la formule
La
distribution des valeurs des fonctions entières[modifier]
« Soit une fonction
de la variable complexe définie par la série
la série des modules étant convergente. Si R est une région du plan
complexe où la variation de l'argument de
est inférieure à
lorsque
varie, la fonction
ne peut s'annuler qu'en dehors de cette région. »
Les zéros des fonctions
entières[modifier]Par suite du théorème fondamental de l'algèbre, un polynôme de degré n
admet n racines dans
.
Donc, plus un polynôme admet de zéros, plus il croît rapidement.
Ceci est aussi le cas des fonctions entières mais d'une manière plus
complexe. La relation entre la croissance des fonctions entières et la
répartition de ses zéros constitue l'un des thèmes principaux de la
théorie de ces fonctions.
La
formule de Jensen et l'exposant de convergence des zéros[modifier]Cette formule est fondamentale dans la suite de la théorie, même si
elle n'intervient pas explicitement. On la démontre par exemple par
l'emploi de la formule de Green.
On a, pour une fonction ayant des zéros aux points
,
ne présentant aucun pôle dans le disque
et en posant
Cette formule est la
formule de Poisson-Jensen.
On en déduit la
formule de Jensen:
« Soit f une fonction analytique dans le disque
contenant les zéros .
Alors
»
Cette formule permet de lier le nombre des zéros à la croissance de
la fonction. Soit
une fonction entière ayant tous ses zéros
dans le disque de rayon
.
On appelle
le nombre de zéros de modules inférieurs ou égaux à
.
On a alors
et ainsi, pour une fonction non nulle en 0, on trouve la forme
suivante de la formule de Jensen:
Pour une fonction entière d'ordre
fini, on voit que
.
On en déduit que la série
est convergente pour
On appelle ainsi
ordre réel (Borel) ou
exposant de
convergence de la suite des zéros la valeur de
la plus petite pour laquelle la série converge. On en déduit donc ce
théorème de Borel:
« L'exposant de convergence de la suite des zéros est au plus
égal à l'ordre. »
Le genre[modifier]On dit que la fonction entière
f est de
genre p,
d'après Laguerre, lorsque l'on peut la mettre sous la forme
ou
sans que cette décomposition puisse se faire pour
p-1, où
Q est un polynôme de degré
p au plus,
P, un polynôme
quelconque et le produit infini le produit de Weierstrass.
Le plus petit entier qui majore l'exposant de convergence est aussi
le
genre de la fonction.
Le genre se détermine par la formule de Laguerre :
« Une fonction entière
est de genre
si et seulement si
tend vers 0 uniformément quand
tend vers l'infini. »
On ne saurait être trop prudent avec la notion de genre. Lindelöf a
montré que la fonction
où
est d'ordre 1, et de genre 0 mais
est de genre 1. De même
est de genre 1 mais
est de genre 0.
Valiron a montré cependant le théorème suivant :
« Si f est une fonction de genre n, les fonctions f-a
sont de genre n également sauf pour une valeur de a au
plus. »
Un théorème de Laguerre[modifier]Dans ses investigations sur les fonctions entières à la suite du
mémoire fondateur de Weierstrass,
Laguerre démontra que
« Si une fonction entière f admet des zéros tous réels, il en
est de même de sa dérivée pourvu que le genre de f soit égal à 0
ou à 1. »
Le
lien entre la croissance et la distribution des zéros[modifier]Le résultat le plus profond est le petit théorème de Picard qu'on
énonce ainsi
« Toute fonction entière prend toutes les valeurs complexes sauf
une au plus. »
La valeur non prise éventuelle est appelée
valeur exceptionnelle
de Picard.
« Soit une fonction d'ordre fini ,
d'ordre précisé L
et
le nombre des zéros de module inférieur ou égal à .
On a l'inégalité
»
Les fonctions
entières d'ordre non-entier[modifier]Dans le cas des fonctions entières d'ordre non entier, celles-ci
n'admettent aucune valeur exceptionnelle au sens du théorème de Picard.
Ces fonctions ont donc une infinité de solutions à l'équation
,
quelle que soit la valeur de
et en particulier
« Toute fonction entière d'ordre non entier admet une infinité de
zéros. »
Les fonctions entières
d'ordre entier[modifier]Si l'ordre est entier, le cas d'exception du théorème de Picard est
possible. Dans ce cas, on a la précision suivante apportée par Émile
Borel:
« Le nombre
des racines de l'équation
de module inférieur à
ne peut être d'un ordre de grandeur inférieur à
que pour une seule valeur de
au plus. »
On montre qu'il existe des fonctions entières d'ordre entier n'ayant
qu'un nombre fini de zéros et qui ne se réduisent pas à un polynôme.
Mais cela ne peut être le cas des fonctions entières paires dont l'ordre
est un entier impair.
Les fonctions entières et
les angles[modifier]
« Une fonction entière d'ordre
est d'ordre
dans tout angle de mesure supérieure à . »
Les cercles de remplissage[modifier]Le mathématicien français Milloux, dans sa thèse soutenue en 1924, a
défini des cercles particuliers, appelés par lui
cercles de
remplissages et dont le rayon augmente indéfiniment, dans lesquels
la fonction entière prend toutes les valeurs en dessous d'un nombre A(r)
tendant vers l'infini avec r sauf peut-être dans un cercle dont le
rayon tend vers 0 avec 1/r. Il a démontré le résultat suivant :
« Soit f(z) une fonction entière et
une quantité aussi petite qu'on veut et inférieure à 1. On pose
et .
On suppose que r est suffisamment grand pour que
dépasse .
Alors f(z) vérifie l'une des deux propriétés suivantes :
1/ Dans la couronne circulaire d'épaisseur ,
dont la circonférence médiane est la circonférence |z|=r, on a
l'inégalité
;
2/ Il existe au moins un cercle C(r), appelé cercle de remplissage,
dont le centre est sur le circonférence |z|=r et de rayon
dans lequel la fonction f(z) prend toutes les valeurs inférieures en
module à A(r), sauf peut-être dans un voisinage d'une valeur a(r), ce
voisinage étant inclus dans le cercle de centre a(r) et de rayon
2/A(r). »
Les cercles de remplissage sont utiles pour préciser les solutions de
l'équation f(z)=a.
Les valeurs asymptotiques[modifier]On peut se demander si une fonction entière non constante peut, dans
certaines régions, avoir une valeur asymptotique finie ou si elles ont
toujours une limite finie. On sait qu'elles ne peuvent pas avoir de
valeurs asymptotiques finies dans toutes les directions par suite du
théorème de Liouville. On dit que f admet la valeur asymptotique a s'il
existe un chemin, appelé
chemin de détermination a pour lequel
f(s) tend vers a quand s tend vers l'infini en restant sur le chemin.
Donc
« Pour toute fonction entière non constante, il existe au moins
un chemin de détermination . »
« Pour une fonction d'ordre inférieur à 1/2, il existe une
infinité de cercles de centre l'origine et de rayon indéfiniment
croissant sur lesquels le module minimum tend vers l'infini. Il n'existe
donc pas de valeur asymptotique finie pour les fonctions entières
d'ordre inférieur à 1/2. »
En fait, Wiman a montré le théorème suivant :
« Pour une fonction
d'ordre
et d'ordre précisé L ,
on a, pour tout ,
l'inégalité
sur une infinité de cercles de rayons tendant vers l'infini.
On a donc sur ces cercles
»
Supposons maintenant qu'une fonction entière possède deux chemins de
déterminations a et b. Alors, dans le domaine défini entre les deux
chemins de détermination soit il existe un chemin de détermination
,
soit les valeurs a et b sont égales et tout chemin vers l'infini inclus
entre les deux chemins de détermination est un chemin de détermination a
(=b).
La conjecture de Denjoy[modifier]Il a été conjecturé par Denjoy qu'une fonction entière d'ordre fini
a au plus
valeurs asymptotiques. Cette conjecture est devenue le théorème de
Ahlfors.
Il ne peut ainsi y avoir qu'au plus
lignes droites allant de 0 à l'infini et menant à des valeurs
asymptotiques différentes. De ce fait, l'angle entre deux telles lignes
est au moins
.
La fonction
indicatrice de Phragmén-Lindelöf[modifier]La définition de l'ordre
d'une fonction entière d'ordre fini et les théorèmes de
Phragmén-Lindelöf suggèrent l'intérêt qu'il y aurait à étudier la
fonction
en fonction de
puisque la croissance sur une demi-ligne se répercute sur les lignes
voisines.
Par définition,
est l'indicatrice de de Phragmén-Lindelöf. C'est une fonction
périodique de période
qui peut prendre des valeurs réelles, mais peut être
ou
.
On a alors :
« Soit f une fonction entière d'ordre
et d'indicatrice .
Si h est finie dans l'intervalle [a,b] alors, quel que soit ,
il existe
tel que pour tout ,
on ait
uniformément dans tout sous-intervalle de ]a,b[. »
dont on déduit :
« Sous les conditions du théorème précédent, tout sous-intervalle
dans lequel
est de longueur supérieure à .
Tout sous-intervalle dans lequel
est de longueur inférieure ou égale à .
De plus tout sous-intervalle où
est suivi d'un point où
et d'un intervalle où . »
Le théorème de Carlson[modifier]On peut se demander s'il existe des conditions assurant qu'une
fonction entière soit définie de manière unique par les valeurs qu'elle
prend sur un ensemble dénombrable. Posé de cette manière, sans
restriction sur l'ensemble, il semble que la réponse soit négative a
priori. En fait, il n'en est rien et dans ce genre de question, le
résultat de Carlson est à l'origine de toute un pan de recherche. On
peut l'exprimer de la manière suivante :
« Soit f une fonction entière d'ordre 1 et de type .
La fonction f est entièrement déterminée par les valeurs f(n), pour
n=1, 2, … De plus, si le type est strictement inférieur à ln 2, alors
»
Sa démonstration utilise l'indicatrice de Phragmén-Lindelöf.
Le théorème de Pólya[modifier]Les valeurs entières prises sur un ensemble par une fonction entière
imposent des restrictions sur sa croissance. Pólya, en 1915
[2],
a par exemple démontré le théorème suivant
« Soit
une fonction entière prenant des valeurs entières sur l'ensemble des
entiers non négatifs. Si
alors
est un polynôme. »
Autrement dit, la plus petite (au sens de la croissance) fonction
entière non polynomiale qui prend des valeurs entières sur les entiers
naturels est la fonction
Ces résultats ont été généralisés aux fonctions entières prenant des
valeurs entières sur une suite géométrique, ...
La
théorie des fonctions entières d'ordre infini de Kraft-Blumenthal[modifier]en travaux...
Une fonction entière est d'ordre infini lorsqu'elle n'est pas d'ordre
fini. Il avait été remarqué très tôt par Emile Borel que, dans le cas
des fonctions entières d'ordre fini
,
s'il existait une infinité de cercles de rayon r sur lesquels la
croissance était de l'ordre de
,
il était possible que la croissance soit d'un ordre sensiblement
inférieur sur une infinité d'autres cercles. Ces fonctions sont dites à
croissance irrégulière. Le même phénomène existe pour les fonctions
d'ordre infini.
La théorie repose sur l'existence de fonctions types et sur la
définition de l'ordre
selon la formule
La théorie
des fonctions entières d'ordre 0[modifier]Cette
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Applications
de la théorie des fonctions entières[modifier]La théorie des fonctions entière permet, par le théorème de
Liouville, de démontrer de manière simple et élégante le théorème fondamental de l'algèbre.
Cette théorie apparaît aussi dans la démonstration de l'existence
d'une infinité de zéros de la fonction zêta de Riemann dans la
bande
par la propriété que les fonctions entières d'ordre non entier ont une
infinité de zéros.
La théorie permet aussi l'étude des fonctions méromorphes comme
quotients de deux fonctions entières. Les fonctions méromorphes
apparaissant naturellement dans nombre de problèmes d'équations
différentielles.
Ces méthodes restent aussi une source d'inspiration importante pour
l'étude des fonctions analytiques plus compliquées, avec plusieurs
variables, ...
Bibliographie[modifier]
- Barnes, A memoir on integral functions, philosophical transactions
of the royal society of London, série A, Volume 199, 1902, p. 411-500
- Boas, entire functions, Dover, 1954,
- Borel, les fonctions entières, Gauthier-Villars, 1928 (deuxième
édition)
- Blumenthal, Les fonctions entières d'ordre infini, Cahiers
scientifiques, 1914
- Levine, entire functions, AMS,
- Nevanlinna, Le théorème de Picard-Borel et la théorie des fonctions
méromorphes, Monographies sur la théorie des fonctions,
Gauthier-Villars, 1929
- Valiron, Fonctions convexes et fonctions entières, Bulletin de la
SMF, T60, 1932
- Valiron, Les fonctions entières d'ordre nul et d'ordre fini, thèse,
1914
- Valiron, Fonctions entières d'ordre fini et fonctions méromorphes,
- Valiron, Lectures on the general theory of integral functions,
Chelsea Publishing, 1949
- Valiron, Fonctions entières et fonctions méromorphes d'une variable,
mémorial des sciences mathématiques, Gauthier-Villars, 1925.